De la causalité esprit-matière...

Bonjour et bienvenue sur ce blog

Si vous refusez comme moi la nécessité scientifique d'un monde absurde ;

Si vous n'acceptez pas que le hasard soit considéré comme une cause agissante ;

Si vous tentez d'imaginer que notre monde (non restreint à l'univers observable) est causal mais que vous tenez aussi à votre libre-arbitre ;

Si vous n’aimez pas faire intervenir de façon trop triviale un Dieu à la volonté insondable pour expliquer ce qui vous échappe ;

Si ce que je vous dis ici vous parle ;

Alors soyez les bienvenus :

nous sommes sur la même longueur d'onde pour tenter d'imaginer, ensemble, autre chose réconciliant ce que nous proposent la science et la religion d'aujourd'hui dans leur opposition manichéenne.


Patrice Weisz

7- Conscience systémique



Vues de l'esprit
Fantaisies et réflexions sur l'être et l'âme
Douglas Hopfstadter et Daniel Dennett
Pour compléter le texte précédent sur la relation entre l'esprit et la matière, je tirerais de ce livre surprenant et divertissant une expérience de pensée qui prête à réfléchir. Je vais la résumer ici, 10 ans après l'avoir lu, donc de façon très approximative.
En préalable :
Le cerveau est constitué d'un vaste ensemble de macro-cellules les "neurones" qui sont reliées entre elles par de nombreuses connexions. Le réseau ainsi constitué est le siège de notre mémoire, de nos idées et de toute notre activité cérébrale. C'est la matière grise. A l'heure actuelle, avec un scanner à résonnance magnétique nucléaire (RMN) on peut facilement observer le fonctionnement de ce cerveau en direct en voyant les zones qui s'activent en fonction des pensées du sujet observé. Donc cela confirme de façon empirique et incontestable que ce réseau est le support de notre conscience.
Le fonctionnement d'un neurone est analogue à celui d'un condensateur électronique :
il reçoit des charges électriques (ions) venant de ses nombreuses connexions (synapses) aux autres cellules (neurones, récepteurs sensoriels, cellules musculaires).
En simplifiant, si ce neurone atteint sa valeur de seuil (-60mV de mémoire) il se décharge et envoie à son tour une charge électrique (message nerveux) vers les neurones en aval (liaisons synaptiques) par l'intermédiaire de ses terminaisons axonales.
De la même façon, un condensateur accumule des charges électriques et au-delà de sa valeur de seuil, décharge cette électricité emmagasinée dans le réseau électrique dans lequel il se trouve.

Une fois ce préalable établi, revenons à l'expérience de pensée de "Vues de l'esprit" :

Maintenant imaginons que les progrès de la médecine et de l'électronique permettent de remplacer un neurone défectueux par son équivalent électronique, c'est à dire un condensateur ayant exactement les mêmes caractéristiques : et qu'il soit connecté aux réseau neuronal de façon totalement transparente. Et bien le point de vue matérialiste affirme que l'esprit ou la conscience supporté par ce réseau contenant un neurone artificiel, ne serait pas affecté.
Le sujet penserait de la même façon dans la mesure où la structure du réseau serait inchangé.
En poussant l'expérience plus loin, changeons un par un les neurones naturels par des neurones artificiels, jusqu'à obtenir un réseau électronique complet de condensateurs ayant la même structure. A priori la conscience serait identique, le sujet serait toujours le même, avec un "moi" identique. Surprenant, non ?
Une fois ceci admis on peut alors, mais ce n'est pas le propos ici, pousser l'expérimentation jusqu'à dupliquer ce circuit afin d'obtenir des clônes parfaits de conscience, etc..
Je vous laisse découvrir ce livre contenant d'autres textes poussant le matérialisme à l'extrême.
Néanmoins je ne partage pas ce point de vue du maintien de l'identité de la conscience en changeant son support our un circuit purement électronique. Je crois, malgré tout, que la conscience ainsi obtenue serait différente dans la mesure où, pour les raisons évoqués dans l'article précédent, je déduis qu'il y a de la substance-esprit associée à chacun des éléments constituants un réseau complexe et que tout comme il y a une différence de matière intervenant dans la composition du neurone et dans celle du condensateur, la substance-esprit qui est associée à cette matière est différente. Donc a un impact sur la nature de la conscience dont le nouveau réseau en est le support. Comme tous les paradoxes menés par des expériences de pensée qui ne sont pas réalisables concrètement, une multitude de caractéristiques liées au neurone et le différenciant inévitablement d'une condensateur sont négligées ici. Et comme souvent dans les expériences où l'on néglige des paramètres, on arrive à des résultats qui sont éloignés des résultats de l'expérimentation effective. Même si on ne reconnait aucune réalité à la substance esprit liée à une particule de matière, la nature des propriétés émergentes d'un système est lié à la nature de ses parties, de ses éléments constitutifs. A plus forte raison si on reconnait comme rationnel le raisonnement consistant à postuler une réalité non réductible de lanature de la conscience à une spécificité de l'organisation de la matière.
Il me semble en effet que la nature de la substance-esprit associée à une particule de matière est liée à la nature de cette particule. Que chaque type de particule élémentaire possède son équivalent dual de particule-esprit dans le monde réel. Qu'une organisation de neurones ne peut avoir une conscience strictement identique à la même organisation faite à partir d'éléments de bois ou de fer ou même de composants électroniques.
Le monde des phénomènes, celui de la matière physique, est la partie visible, le pendant de son dual spirituel non observable mais bien réel.
Par contre l'équivalence observée entre notre conscience et le réseau neuronal qui la supporte peut se généraliser à tout ensemble de matière complexe. Les matérialistes ne me contrediront pas.
De plus l'apport que je fais en introduisant la dualité des particules-esprit ne pose aucun problème à la science dans la mesure où celles-ci résident dans le monde réel dont ne s'occupe pas la physique, quelle soit astrophysique ou physique quantique.

Une dernière remarque :
L'esprit agit sur sa matière complexe support et permet donc à la volonté d'agir dans le monde des phénomènes. Mais le contraire est valable aussi. C'est à dire que la matière agit également sur l'esprit.
Le stimuli visuel engendré par la vue d'un objet par exemple, remonte les circuits nerveux via les capteurs sensoriel liés au nerf optique, et donc envoie un message nerveux au réseau neuronal. Ce message nerveux influence les valeurs de charge des neurones et engendre au niveau du sujet des changements d'idées, des pensées, de nouvelles émotions.
De la même façon le scalpel du neuro-chirurgien, en modifiant physiquement par exemple par ablation partielle du réseau neuronal, engendre des états modifiés de conscience, jusqu'à changer le "moi" du sujet. De nombreuses expériences de ce type ont été menées confortant de façon empirique cette réalité factuelle.
Et je ne parle pas ici de la psychanalyse qui également peut intervenir en modifiant la structure d'une psyché par des méthodes plus douces afin de soigner les névroses et psychoses chères à Freud.
Donc on retrouve ici encore cette assertion que l'esprit peut agir sur la matière et la matière peut également agir sur l'esprit. Il y a donc une fois de plus lien de causalité évident entre ces deux mondes, celui des phénomènes et celui du spirituel. Vous le saviez déjà.

L'élément neuf est que la dualité causale esprit-matière s'applique à tout type de matière et donc engendre un monde-esprit complexe et diversifié à l'image de celui du monde-matière, non cantonné à la complexité du cerveau humain, mais s'étendant à la globalité de l'univers phénoménal. En effet, la complexité ne réside pas uniquement dans le cerveau humain. Les systèmes complexes sont nombreux dans la nature et sont donc, même en ne prenant que le point de vue minimum du matérialisme, tous support de conscience.

Patrice Weisz

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