La Réalité du Divin
Nous avons vu en étudiant de près la physique, que la notion de matière disparaissait au profit de la notion d'énergie, et que la notion d'énergie disparaissait au profit d'un vide contenant du mouvement plus ou moins ordonné. Nous avons vu que l'ordonnancement du mouvement se faisait par une superforce invisible, décrite par des lois mathématiques.
Nous avons vu également que cette superforce était réelle, cause du hasard apparent et de la pseudo-causalité du monde des phénomènes.
Il est temps maintenant de voir quelle approche est retenue par les différentes théologies afin d'essayer de dégager les points de convergences possibles entre sciences et religions.
Quelques attributs de Dieu (Allah) repris pour exemple dans la théologie musulmane :
Dieu existe sans endroit et Il n'est pas dépendant du temps.
Dieu est unique, Dieu est éternel, il n'a ni début ni fin
Il crée et anéantit tout ce qui existe à part Lui.
Tout ce qui se passe dans cet univers advient par le vouloir de Dieu, et toute chose est caractérisée par Dieu
Dieu est vivant sans âme ni chair ni coeur. Sa vie n'a pas de ressemblance avec la notre. Il est vivant et ne meurt pas.
Dieu n'a pas de ressemblance avec les créatures.
Al Hacq, l'un des 99 noms de Dieu veut dire : le Réel.
Dans la Kabbale Juive, Dieu est l'absolue divine réalité
Dans les 3 grandes religions monothéistes, Dieu est l'Etre suprême, créateur de notre univers et doué de perfection absolue.
Néanmoins, le christianisme, à travers la Trinité, reste un peu à l'écart de cette vision de Dieu, en complétant sa nature non matérielle par deux apparences physiques.
Le Christianisme est la seule religion monothéiste reconnaissant à un homme ayant véritablement existé, Jésus-Christ, l'état de divinité humaine, car Fils de Dieu sur Terre. A travers le dogme de la Trinité, il reconnaît également la nature phénoménale du Souffle de Dieu : le Saint-Esprit. Le Saint Esprit procède du Père et du Fils selon l'Occident et seulement du Père en étant "consubstantiel" au Fils selon l'église orthodoxe de l'Orient. Ces deux églises n'ont à ce jour toujours pas trouvé un terrain d'entente sur ce sujet, malgré de grandes discussions oecuméniques en cours, preuve de la complexité du sujet.
La vie est sortie de l'eau grâce au souffle de Dieu dans la Genèse. Les êtres vivants sont donc composés d'eau et de l'énergie vitale du souffle divin d'après l'Ancien Testament. Dans le Christianisme, l'Esprit-Saint, agit directement dans le monde phénoménal. L'esprit Saint est à l'origine de la naissance de Jésus-Christ, ayant soufflé sur Marie pour lui permettre l'immaculée conception.
Il est même observable d'après les textes du Nouveau testament:
« Et il se fit tout à coup du ciel un son, comme d'un souffle violent et impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. Et il leur apparut des langues divisées, comme de feu ; et elles se posèrent sur chacun d'eux. Et ils furent tous remplis de l'Esprit Saint, et commencèrent à parler d'autres langues, selon que l'Esprit leur donnait de s'énoncer. »décrivant ainsi dans l'Acte des Apôtres Sa venue prédite par Jésus le jour de Pentecôte.
Je prendrais ici cette description "physique" comme une parabole, une apparition subjective, une illusion collective afin d'essayer de dégager une généralité sur le concept de Dieu. Car la Trinité, en donnant un corps humain au Fils de Dieu, et une existence réelle au Souffle de Dieu dans le monde observable, se rapproche de la mythologie grecque, et marque peut-être là la transition entre le polythéisme historique et le monothéisme clairement affiché de l'Islam, la plus jeune des religions révélées.
Malgré cela, le concept que l'on retrouve le plus fréquemment dans les textes est celui de Dieu le Père, donc je laisserais volontairement de côté la Trinité, dont les explications théologiques génèrent la plupart du temps une rhétorique complexe dont la logique est difficile à saisir.
L'unicité de Dieu reconnue par les 3 grandes religions du livre, doit permettre de ne garder que les attributs qui sont commun à toutes ces religions, indépendamment des aspects culturels et cultuels. Dieu doit pouvoir se définir en dehors de la perception humaine, en dehors de tout particularisme religieux, en dehors de toute sensation phénoménologique liée à la foi.
Dans la religion hindouiste, le symbole Om signifie l'esprit cosmique. Il permet de symboliser Brahman.
Brahamn est la Réalité Ultime, l'âme Absolue ou Universelle.
Brahman est indescriptible, inépuisable, incorporel, la première existence infinie, éternel.
Il est le principe ultime sans commencement et sans fin qui est caché dans tout et qui est la cause de toute création.
L'Hindouisme est souvent pris comme une religion polythéiste, à cause des différents avatars de Brahman : Vishnu, Shiva, Rudra, etc.. Mais les hindous ne se considèrent pas eux-mêmes comme une religion polythéiste. Ils sont hénothéistes, c'est à dire considèrent qu'il y a qu'un seul Dieu représenté par plusieurs divinités dont chacun peut choisir de célébrer le culte. Là aussi,il y a ambiguité entre Dieu et ses différents représentants de nature divine.
Néanmoins, on retiendra comme grands attributs communs des différentes théologies pour définir le concept de Dieu :
Dieu est unique, créateur du monde, situé en dehors du temps et de l'espace, et donc éternel et infini.
Dieu est aussi réel, inconnaissable et cause de tous les phénomènes.
Cette idée de Dieu est dissociée des différents cultes pratiqués. Tous les être humains ne croient pas en Dieu, et ceux qui croient en Lui ne croient pas tous de la même façon. En conséquence, il existe plusieurs attitudes possibles caractérisant les positions individuelles face à Dieu :
Le panthéisme : Dieu n'est pas un être distinct du monde mais il lui est immanent : tout ce qui est existe non seulement par Dieu mais en Dieu.
Le théisme : il admet l'existence d'un dieu unique, mais y ajoute l'obligation de lui rendre un culte, d'obéir à ses lois. Dieu est au-dessus du monde, il est transcendant.
Le déisme : c'est la croyance en un dieu créateur, dont la nature est inconnaissable. Les déistes ne reconnaissent pas la nécessité de la pratique religieuse, ne reconnaissent pas la vérité des textes sacrés ni des messies.
L'agnosticisme : c'est l'attitude de pensée consistant à exprimer le fait que l'on ne peut pas savoir si Dieu existe ou pas. Que c'est une proposition indécidable. Qu'il est possible que certaines personnes aient eu des révélations mais qu'elles ne peuvent pas le prouver. Qu'aucun témoignage ne peut être vérifié.
L' athéisme : C'est l'attitude refusant toute croyance en une entité divine, et donc le bien fondé de toute religion. Les athées ne caractérisent pas leur position comme une croyance mais comme un état d'esprit.
A l'intérieur de ces différentes attitudes, il y a encore des nuances secondaires possibles. Mais ce qui devient intéressant dans l'analyse de ces attitudes principales, c'est d'essayer de faire le parallèle avec les croyances scientifiques.
Dans un texte précédent, intitulé la cosmologie dualiste est-elle scientifique ? , on a vu que, concernant la problématique de l'esprit et la matière, on trouvait plusieurs attitudes : idéaliste, matérialiste, dualiste.
On a rencontré également, concernant les phénomènes observés et l'existence d'un réalité inconnaissable des points de vues différents : phénoménalisme, rationalisme, réalisme, intentionnalisme, etc.. On se rend compte que l'on peut ainsi rapprocher les attitudes scientifiques et les attitudes religieuses, il suffit pour cela de poser l'égalité suivante :
L'attitude scientifique et l'attitude religieuse se retrouvent alors dans le même bateau, faisant cause commune pour tenter de parler de l'inconnaissable de façon objective, empiétant toutes deux sur le sujet au coeur du discours de la métaphysique.
Pour cela elle tente de démontrer que les causes sont dans les phénomènes, dans la substance de la matière. Elle se retrouve finalement en train de décrire une super force à l'origine de tous les phénomènes et faisant émerger la matière du vide, la vie et la conscience de la matière. La science reconnaît l'existence de principes non démontrables à l'oeuvre en permanence dans l'évolution du monde.
Certains scientifiques reconnaissent l'existence d'une réalité indépendante et inobservable dont les phénomènes sont les effets, d'autres nieront cette réalité et limiteront le monde à ce que l'on peut en percevoir de façon objective. Ce qui pose alors le problème également de l'origine des phénomènes hasardeux, des principes physiques constatés et de la nature de la conscience qui ne peut s'observer autrement que subjectivement et donc crée des divergences d'attitude quant à son identité d'avec la matière.
La religion quant à elle ne fait que décrire l'action d'une entité divine sur le comportement humain et le devenir du monde. Cette entité est à l'origine du monde, sorti également du vide, et est tantôt constitutive du monde observable, tantôt en dehors de ce monde mais agissant dessus. A travers les différents cultes, des principes explicatifs se dégagent également, déterminant l'action de la force de l'entité divine selon des règles morales et non simplement énergétiques comme en physique. En ce qui concerne la conscience, la religion reconnaît un rapport certain entre elle et l'entité divine à travers la notion d'âme, d'essence divine.
La métaphysique quant à elle cherche à définir l'Etre qui se cache derrière le monde, derrière les phénomènes et les observations. Elle cherche à définir ses attributs unicité, infini, etc..La métaphysique s'attelle aussi à essayer de définir la notion de substance, en l'opposant à celle d'essence. L'essence étant tantôt d'origine spirituelle, tantôt d'origine réelle.
La métaphysique se vide de son sens face à l'attitude formaliste des scientifiques niant tout signifié aux équations, mais également face à celle des agnostiques postulant la vanité de toute tentative de description de l'en-dehors du monde sensible.
On voit ici assez aisément que la fusion du concept de Dieu transcendant et du concept de réalité est facile à faire, bien que les terminologies souvent éloignées tentent à produire des images mentales de ces concepts ayant des différences.Bien sûr un scientifique réaliste ne se sentira pas pour autant nécessairement déiste à priori. Mais en essayant d'extraire de sa croyance en une réalité indépendante la substantifique moëlle, en essayant de définir par l'addition d'attributs ce qu'est la nature de la réalité se cachant derrière les phénomènes, il se retrouvera à postériori en train d'emprunter les mêmes mots que ceux définissant Dieu. Et si deux signifiés se caractérisent par les mêmes attributs, les mêmes propriétés, alors c'est qu'ils sont logiquement tout simplement identiques.
D'autre part une autre fusion conceptuelle est possible entre l'esprit et le mouvement dans la réalité. L'esprit en tant que matériau "non matériel" de la conscience, prend sa source dans cette réalité non observable. Mais l'esprit est action, donc mouvement. L'esprit est ainsi une substance faite de réalité et de mouvement, pouvant agir sur la matière. L'esprit ainsi défini, contient du réel "divin" et du mouvement "physique".
Donc on peut poser :
L'esprit agit sur la matière sans en être, l'esprit n'a pas d'étendue et n'est pas observable objectivement car c'est un phénomène intérieur. L'esprit modifie le mouvement (c'est la notion de liberté qui s'affranchit du déterminisme matériel). L'esprit prend sa source dans la Divine Réalité.
Les différentes attitudes tant scientifiques que religieuses évoquées marqueront toujours les fissions possibles à cette fusion conceptuelle.
Si la moitié de l'humanité croie et l'autre non, peut -il y avoir raisonnablement 3 milliards d'être humains dans l'erreur ?
Pour ma part je soupçonne et je soutiens ici que le vocabulaire est différent, que les approches sont différentes mais que les signifiés sont les mêmes.
Que celui qui ne croit pas en Dieu croit alors en la science et donc reconnait implicitement la création du monde à partir du vide, l'existence d'une superforce responsable de l'auto-organisation de la matière jusqu'à la conscience, et la nécessité d'une réalité inconnaissable causant les phénomènes observés.
Et que celui qui croit en Dieu croit en un Dieu créateur du monde à partir du vide, croit en l'action de ce Dieu sur l'organisation du monde, sur l'avénement de la vie et de l'être humain conscient, et reconnait que Dieu est en dehors du temps et de l'espace.
Donc que, moyennant une épuration de concepts galvaudés et leur mise en parallèle, tout le monde parle in fine du même Etre.
De plus, concernant les agnostiques et les scientifiques formalistes, il me semble que leur position prônant l'indécidabilité incontournable du choix ne tient pas.
Car il me semble que le raisonnement rationnel consistant à dire que
si "quelque chose" arrive, alors il y a forcément une cause à l'origine de ce "quelque chose",
pousse le scepticisme dans ses retranchements. En effet, quelque soient les différentes approches utilisées au cours de l'histoire pour tenter d'expliciter cet axiome de la pensée humaine, il me parait totalement incontournable pour s'autoriser à parler de quelque chose. Sans accord initial sur cet à priori, peut-on formuler la moindre proposition logique, y compris celle postulant que la proposition théologique : "Dieu existe" est indécidable ? Ou que la proposition scientifique : "Les lois de la physique décrivent quelque chose de réel " n'est pas vraie ?
Tout comme on ne peut pas nier logiquement la perception subjective de la pensée, on ne peut pas nier logiquement que les phénomènes ont une cause certaine. Reconnaitre ceci, c'est alors nier l'inexistence du réel inobservable. C'est donc reconnaître qu'il est impossible que (Dieu=Réalité) n'existe pas. C'est donc invoquer la nécessité logique de l'existence de la Divine Réalité.
La fusion des concepts effectuée ici, permet de fonder dans un ensemble plus cohérent , une cosmologie transdiciplinaire plus simple ayant l'avantage de ne dénigrer aucune approche existante.
5 commentaires:
Il est interessant, à mon sens, de se demander comment les gens découvrent dieu... L'éducation fait que dieu est souvant découvert au travers de la religion mais il y a-t-il des choix de religion après la découverte de dieu...? Les enfants ne croient-ils pas en la religion qu'il pratique ou qu'on leur fait pratiquer sans croire nécessairement en dieu ?
De mêmen, le déiste est-il convaincu de sa position ou simplement en attente d'une religion ?
Bonjour Fred,
et merci pour ton commentaire.
Pour abonder dans ton sens, voici quelques éléments de réponses, il me semble, à ton questionnement.
Effectivement, il y a plusieurs chemins qui peuvent mener à Dieu :
1) La révélation par la foi qui à priori peut arriver à n'importe qui, et ceci indépendamment de ses croyances, quoique qu'il est très rare de connaitre la foi sans aucune éducation religieuse préalable. L'Islam dit d'ailleurs que la pratique de la religion mène à Dieu. C'est souvent le chemin emprunté par les enfants qui recoivent un enseignement ayant pour but de les amener à la foi.
La foi ne s'accompagne pas obligatoirement de la nécessité de preuves ou de raisonnements convaincants. C'est ce qui fait sa force. De plus elle s'accommode de la contradiction apparente du monde, car son existence intérieure est vécue comme une vérité beaucoup plus forte que tout raisonnement logique ou que tout fait d'observation.
Mais l'enseignement religieux peut aussi curieusement donner des pratiquants non croyants je te l'accorde.
2) La réflexion sur l'origine du monde qui parait rendre incontournable un Dieu créateur ou un principe d'évolution, c'est le travail que je mène ici, n'étant pas du tout satisfait par la réponse scientifique du hasard tout puissant posé comme une cause à l'origine de l'auto-organisation.
On peut devenir Déiste et ne pourtant pas vouloir exprimer en actes le culte de la divinité, tout comme on peut le devenir après une remise en cause de sa propre religion.
On peut aussi être déiste puis théiste en choisissant à postériori une religion existante proche de sa sensibilité dans laquelle les croyances peuvent se transformer en actes.
Depuis les années 70 , c'est l'expression du mouvement New age qui à mon sens caractérise le mieux la volonté des déistes, non satisfaits des religions habituelles, de se regrouper afin d'imaginer une religion différente.
Some people worship Allah for the purpose of gaining His gifts. This is the worship of the merchants. Some worship Him for the purpose of avoiding His punishment. This is the worship of the slaves. Some worship Him as showing gratitude to Him. This is the worship of the genuine ones. It is the best worship.
bonjour
je trouve que c'est un très bel article que vous avez écrit. toutes mes felicitations mais je pense que toutes ces religions revélées antieurement ne devaient etre qu'un long processus nous préparant à une ultime religion. tout comme la société a d'abord préparé l'homme petit à petit au respect des valeurs de la nature de la hiérarchie(pere et mere)pour qu'il decouvre par lui meme la réalité du divin
Réponse à..Réflexion :
Merci pour votre commentaire.
Pour abonder dans votre sens je pense effectivement que la succession des religions est un processus en permanente évolution comme celui du monde. Du Paganisme à l'Islam puis au New Age, toutes les religions cherchent à approcher la connaissance ultime : celle de ce que c'est que Dieu.
L'évolution scientifique tente également d'approcher la notion de réalité avec son propre langage mathématique, tandis que la philosophie, à travers la métaphysique et la philosophie de l'esprit se pose des questions sur l'au-delà du phénomène sensible.
Je m'évertue à faire des parallèles entre ces différents domaines du savoir humain pour montrer effectivement qu'une convergence se dessine sur le plan conceptuel.
Est-ce que tout cela nous amènera à une nouvelle religion ? Ne faut-il pas pour mener à bien cette discussion dissocier les pratiques cultuelles inhérentes à toute religion existante ou à venir, afin d'écarter les partis pris, pour ne retenir que le point de vue déiste ?
J'essaie de faire passer une certaine conception de Dieu me paraissant potentiellement fédératrice, mais qui, hélas, trouve difficilement sa place dans une religion donnée.
Curieusement, Dieu, non seulement n'appartient à aucune religion mais y échappe toujours en partie !
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