De la causalité esprit-matière...

Bonjour et bienvenue sur ce blog

Si vous refusez comme moi la nécessité scientifique d'un monde absurde ;

Si vous n'acceptez pas que le hasard soit considéré comme une cause agissante ;

Si vous tentez d'imaginer que notre monde (non restreint à l'univers observable) est causal mais que vous tenez aussi à votre libre-arbitre ;

Si vous n’aimez pas faire intervenir de façon trop triviale un Dieu à la volonté insondable pour expliquer ce qui vous échappe ;

Si ce que je vous dis ici vous parle ;

Alors soyez les bienvenus :

nous sommes sur la même longueur d'onde pour tenter d'imaginer, ensemble, autre chose réconciliant ce que nous proposent la science et la religion d'aujourd'hui dans leur opposition manichéenne.


Patrice Weisz

33- La cause première


Dieu peut-il se prouver ?

Au fur et à mesure des publications sur ce blog je tente de donner une vision du monde médiane, entre science et religion, montrant les limites des uns et des autres et esquissant un espace de conciliation possible.
En philosophie, des preuves classiques de l'existence de Dieu sont étudiées, forgées par les plus grands penseurs de l'histoire, mais hélas toutes discutables.
Le principe de causalité si cher aux scientifiques, en amène une, difficile à contourner, c'est la preuve de la cause première :
"Si tout évènement est l'effet d'une cause antérieure, alors il existe nécessairement une cause première à toute chose, non causée. On appelle alors Dieu cette cause à l'origine du Monde."
On a discuté ici le principe de causalité, qui s'avère être un principe non démontré, une attitude de pensée nécessaire à l'avancée scientifique. Sans ce principe, la science ne peut rien expliquer. Mais en introduisant ce principe, elle crée elle-même le mystère des origines qui remet en cause la vision purement matérialiste.
La causalité au sens strict est un principe déterministe, dans lequel le hasard n'intervient pas. C'est une vision du monde pré-relativiste et pré-quantique.
Mais la succession de causes purement déterminées doit nécessairement avoir un point de départ, et c'est là où le bas blesse.
Que l'on soit déterministe ou indétermiste, il est nécessaire d'introduire le hasard comme étant à l'origine du monde, ce qui se traduit selon la théorie actuelle du Big-Bang, par une vibration énergétique aléatoire un peu plus forte que les autres venant agiter le vide quantique originel et donnant naissance aux premières particules.
Carnot à une époque déterministe, définissait le hasard comme le croisement de 2 chaînes de causalité indépendantes.
Si le monde avait débuté par hasard, alors d'après sa définition, cela suppose au moins deux causes indépendantes antérieures à son commencement. Oui mais dans quoi ? Ces causes seraient donc antérieures au début du monde, situées avant et au-dehors de l'espace-temps de la cosmologie actuelle issue du vide il y a 13,6 milliards d'années.
Si on abandonne cette définition classique du hasard, le problème de l'origine reste entier.
Poser un hasard ontologique, non causé, et "causant" des phénomènes indéterministes, appartenant structurellement au monde de la matière, apaise l'esprit mais ne résoud rien.
Cela ne fait que déplacer le problème sur la vraie nature du hasard.
Si la cause première est le hasard, alors qu'est-ce que le hasard ?
J'ai essayé de montrer ici que le hasard ne pouvait pas exister, qu'il n'était que phénoménal, c'est à dire observable mais pas réel. Qu'il était ce que l'homme ne pouvait pas expliquer causalement. Soit par la limitation de ses sens, soit par la limitation de son entendement, soit par la limitation de ce que le monde nous donne à voir de part sa constitution.
La barrière de Plank qui fixe une limite infranchissable à notre investigation dans l'infiniment petit est la frontière incontournable entre la réalité du monde et celle des phénomènes observables.
Ce qui fait que dans le monde physique, phénoménal, le hasard peut apparaitre, comme étant à l'origine de phénomènes non déterminés causalement.
Cette dichotomie entre le causal et l'indéterminé est donc liée à la limite du champ d'investigation de l'homme.
Si le principe de causalité est un principe conditionnant par construction les schémas conceptuels de la pensée humaine, alors il pourrait très bien n'avoir aucune réalité ontologique.
Encore qu'il s'avère que l'ontogénèse de la pensée humaine répond à une construction darwinienne. Dit autrement, nos schémas de pensée collent au fonctionnement apparent de notre réalité, car ils se sont élaborés dans celle-ci, au cours de générations et de générations, nous donnant génétiquement des avantages sélectifs, adaptés à notre environnement.
Si le principe de causalité est si fortement ancré dans notre façon d'appréhender le monde qui nous entoure, c'est que celui-ci répond en partie à ce principe.
Les processus darwiniens ont dotés nos sens de possibilités adaptés à notre environnement, mais ont aussi dotés notre entendement de schémas nous permettant de nous rendre celui-ci compréhensible.
Mais cette compréhension est une compréhension de surface, adaptée à notre échelle et sur notre planète, qui n'a pas été élaborée empiriquement pour répondre à d'autres contextes et surtout pas à l'inobservable ou au passé lointain.
Ce qui fait que l'on plaque un principe explicatif généré par notre environnement quotidien à une réalité dépassant totalement les possibilités de notre entendement.
D'où les paradoxes et les questions laissées sans réponse.
Malgré tout il faut faire avec.
Et du coup, même si le monde ne répond pas au principe de causalité (ce qui est sûrement le cas, car pourquoi serait-il fidèle à l'image restreinte que l'on s'en fait ?) , on ne peut qu'imaginer qu'il y réponde. Car comment concevoir que chaque chose ne soit pas causée ? Comment imaginer un évènement sans cause ?
Pour ma part, malgré le fait d'être conscient de l'emprisonnement que je subis par les limites de mon entendement, je ne peux néanmoins me résoudre à imaginer qu'un phénomène apparaisse sans être l'effet de quelque chose. Du coup je ne peux me satisfaire du hasard comme étant à l'origine de quelque chose, car cela reviendrait à postuler que quelque chose survienne sans cause. Je ne parle pas ici du hasard comme étant une cause ignorée, une méconnaissance, mais comme étant l'absence de cause déterminante.
Si alors chaque chose possède une cause déterminante, le hasard ne peut être qu'apparent. L'indéterminisme observé, notamment en physique quantique est alors un indéterminisme phénoménal, cachant une réalité déterministe.
Chaque évènement a alors une cause certaine, mais celle-ci ne nous est pas accessible, non pas par ignorance mais comme étant la résultante de la conjonction des propriétés du monde et de celle de notre constitution mentale.
Le réel nous est inaccessible, donc les causes non visibles phénoménalement aussi , nous faisant appeler cette absence de causes observables le hasard.
Le hasard n'est pas ontologique, il n'est que physique, la physique ne s'occupant que de l'observable. Et le phénomène hasardeux ne l'est que pour nous, sans possibilité hélas de le voir autrement.
Ce qui fait que le problème de la cause première reste entier, que l'on soit scientifique ou non. Car les hypothèses actuelles faisant jaillir le monde du vide quantique font appel à des processus aléatoires qui ne peuvent qu'avoir des causes réelles certaines.
Ou alors le monde ne répond pas au principe de causalité, mais alors que penser d'un modèle cosmologique construit sur ce principe ?
Ou alors le monde ne réponde que partiellement au principe de causalité, donc le frémissement originel du vide n'a pas de cause ce qui choque l'entendement et parait bien arbitraire et posé là comme point de départ, moins crédible dans son explication que n'importe quelle croyance religieuse.
Ou alors le frémissement des origines a des cause multiples, et c'est cette multiplicité que l'on nomme l'incertain, ce qui ne retire aucune réalité à ce qui l'engendre et dont il faut aussi tenter l'explication. Ce qui ne fait que faire reculer d'un pas en arrière dans la chaine de causalité.

On voit bien ici l'impasse dans laquelle se trouve la science actuelle. Cette impasse est engendrée par le procédé de construction de la science et n'est pas une impasse en attente d'informations nouvelles. Cette impasse est la simple conséquence du principe de causalité qui imprègne notre entendement et du manque de définition du hasard, bouche-trou colmatant les failles du déterminisme.
Le hasard ontologique heurte la logique et remet en cause la démarche scientifique, le hasard de surface suppose une réalité déterministe et nécessite donc un point de départ non matériel, en dehors de l'espace-temps qu'il est supposé engendrer.

La preuve classique de la cause première nous amène donc rationnellement à postuler un élan créateur réel, déterminant le commencement du monde, que l'on voit celui-ci comme étant cyclique ou singulier, qu'il y ait eu des millards d'univers précédant le notre ou que notre univers soit singulier et premier.
Si le temps était infini, le présent ne pourrait être car il n'arriverait jamais. Le fait que le présent soit, suppose un passé fini, et donc un début. Il faut donc un début au temps, et donc une cause en dehors du temps à ce début. Si le temps est une dimension comme une autre, il a pu commencer à exister au même moment que l'espace, à partir du vide. Mais cette genèse originelle n'a pu être que le fruit d'un évènement primordial.
La science, ou plutôt l'esprit humain, se retrouve donc à devoir poser une singularité originelle comme point de départ à tout ce que l'on peut dérouler ensuite causalement.
Donc en conséquence, dans l'hypothèse minimaliste dans laquelle le principe de causalité n'est pas constitutif du monde mais simplement de notre entendement, celui-ci exige rationnellement un élan créateur comme point de départ à tout modèle cosmologique.
Cela revient à dire que l'on ne sait pas de quoi est faite la réalité inaccessible du monde, mais que la logique de construction de notre entendement et notre façon d'appréhender ce que l'on peut observer nécessite l'introduction d'un dieu (ou autre chose) comme cause première à tout.
Par contre dans l'hypothèse dominant actuellement chez les matérialistes scientifiques, où l'on pose le principe de causalité comme étant un principe réel, constitutif du fonctionnement de notre univers et indépendant de nos schémas de pensées, il faut aussi un dieu (peu importe le nom qu'on lui donne, le nom hasard étant préféré par certains) pour imaginer le début de l'univers.
Pour ma part je crois que le principe de causalité ne s'applique qu'à partir du moment où l'espace-temps existe. Il me parait constitutif de la réalité du monde, intégré progressivement par pur darwinisme dans nos schémas de pensées, et ne se laissant pas toujours voir.
En d'autres termes, l'avènement apparent d'une structure spatio-temporel a permis la création de matière, mais aussi l'ordonnancement des évènements, organisation nécessaire à ce que la causalité s'applique.
Avant cela point de causalité structurellement possible, et donc la preuve de la cause première n'a plus de sens dans un pré-monde sans dimension ni temps, ni matière.
Si le temps n'existait pas encore, pas de précédence possible, et donc pas de cause antérieure.
Du coup pas de cause première.
La notion de cause suppose que le principe de causalité puisse s'appliquer. Il faut donc trouver un autre concept pour expliquer le mystère des origines.
Ou une autre substance que celle de matière qui n'a d'existence que dans l'espace et le temps.
Si on postule une autre substance, qui existe en-dehors de l'espace et du temps, alors on peut imaginer qu'elle ait une réalité avant même la création de l'univers.
Cette autre substance ne répond pas aux principes de la physique et ne se localise pas dans l'espace ni dans le temps. Elle n'existe donc pas au sens physique et n'est observable qu'indirectement. Au passage, nous avions déjà vu (27- Les causes invisibles) que l'existence des forces de la physique est déduite de l'observation de leurs effets et non d'une observation directe. C'est donc la croyance dans le principe de causalité qui fondent la croyance en l'existence de forces invisibles auxquelles les scientifiques imputent les effets observés. La pierre chute, donc il existe une force de gravitation qui en est la cause. L'univers existe donc il y a une substance primordiale qui en est la cause (non physique) et qui ne peut être la matière.
Et cette substance primordiale  peut donc être-là avant même la création de toute structure spatio-temporelle. Elle peut même être à l'origine de notre univers ou du premier univers, sans pour autant en être une cause au sens physique.
Cette substance ne remplit pas le pré-monde, ne le peuple pas : elle est le pré-monde; mais celui-ci n'a ni espace ni temps, donc ni commencement ni fin. Cette susbstance est métaphysique, c'est la réalité originelle, ayant toujours été là, et encore présente.
C'est aussi la réalité inaccessible du monde, dans lequel est né un univers physique.
C'est plutôt ce qui a engendré la forme de l'univers physique, ce qui le modèle encore actuellement.
Le monde physique suit curieusement certains principes physiques dans son évolution que l'on constate quotidiennement : ils sont les reflets observables du mouvement que cette substance n'a pas fini d'imprimer dans la matière.
Quand ces mouvements ne répondent pas au principe de causalité, on les appelle hasard. quand ils répondent au principe de causalité on les appelle les forces de la physique ou la superforce des théories unificatrices.
C'est cette autre substance qui est à l'origine du monde. Osons l'appeler "Esprit".
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Patrice Weisz

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Osons l'appeler "Esprit".

Cela ne peut pas servir de conclusion, car c'est très précisément là le commencement. C'est à partir de là (de l'Esprit) que tout apparaît et disparaît continuellement.