De la causalité esprit-matière...

Bonjour et bienvenue sur ce blog

Si vous refusez comme moi la nécessité scientifique d'un monde absurde ;

Si vous n'acceptez pas que le hasard soit considéré comme une cause agissante ;

Si vous tentez d'imaginer que notre monde (non restreint à l'univers observable) est causal mais que vous tenez aussi à votre libre-arbitre ;

Si vous n’aimez pas faire intervenir de façon trop triviale un Dieu à la volonté insondable pour expliquer ce qui vous échappe ;

Si ce que je vous dis ici vous parle ;

Alors soyez les bienvenus :

nous sommes sur la même longueur d'onde pour tenter d'imaginer, ensemble, autre chose réconciliant ce que nous proposent la science et la religion d'aujourd'hui dans leur opposition manichéenne.


Patrice Weisz

1- Le hasard est une illusion

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Dieu s'adressant à un démon. Corrado Giaquinto 1750

Hasard ? Dieu ? Méta-conscience ?

A l’introduction de son cours de terminale, notre professeur de philosophie en guise de préambule, nous expliqua comment apprendre à nager.
Il disait qu’il y a deux façons :
  • La première est de vous faire poser le ventre sur un tabouret, et de vous apprendre à respirer, puis à allonger les bras en mouvement appropriés et enfin de vous montrer comment déplacer les jambes en parfaite synchronisation avec le haut du corps. Cette méthode est longue, certes, mais porte toujours ses fruits.
  • -La seconde, consiste à ce que je vous attrape les deux bras et, par un ample mouvement circulaire de balancier, à vous jeter à l'eau. C'est la plus rapide et c'est ma préférée...
  • Donc prenez le texte « Qu'est-ce que la philosophie » de Martin Heidegger à la page 1 »..et commençons !
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Martin Heidegger
Fort de cette expérience in vivo, plongeons directement dans le vif du sujet du livre que vous tenez entre les mains sans plus attendre :



Modèle et Réalité du monde

La science tente de décrire l’univers observable*. Pour cela elle utilise des modèles géométriques qui par des approximations successives réalisées par tâtonnements au cours de l’histoire permettent de définir des lois mathématiques censées régir l’évolution des phénomènes perçus.
Tout est là ! La phrase précédente, dont j'ai tenté de peser chaque mot souligné, synthétise l'essentiel du raisonnement permettant de fonder de façon rationnelle une réalité du monde différente de celle que l'on observe scientifiquement.
Par science, il faut entendre les sciences dures, de la physique et de la chimie, fondées sur des mathématiques et des faits d'observation. Il s'agit donc de la mécanique (classique, relativiste, quantique), l'électromagnétisme.
Par univers observable : tout ce que l'on peut voir, sentir, toucher, soit par nos sens soit avec des appareils de mesure qui n'en sont finalement que des extensions. Cela exclut donc ce qui est caché à l'observation, parce que trop loin, trop petit, sans trace visible dans le présent, possédant des caractéristiques non mesurables ou dont on a pas connaissance.
Par modèle géométrique : il faut entendre des équations mathématiques décrivant le mouvement d'objets, eux-aussi mathématiques, censés ressembler à quelque chose de réel.
Par approximations successives : plus la science avance, plus son investigation dans le monde devient profonde et précise, ce qui l'amène régulièrement à revoir ses théories. Par exemple, une ancienne théorie qui marche en gros, peut être corrigée suite à une nouvelle mesure plus précise ou une nouvelle observation venant en contradiction avec ses prédictions. Les nouvelles théories deviennent donc englobantes et absorbantes par rapport aux anciennes.
Par lois mathématiques : il faut comprendre les équations célèbres de la physique comme :
E=mc2 ; p=mv ; F=mγ , etc..
tout la symbolique conventionnelle (faisant la hantise des non matheux,) explicitant les relations existant entre certaines grandeurs physiques et représentées par des variables.
Par censées régir l'évolution : il faut comprendre que les modèles marchent jusqu'à preuve du contraire, et ne peuvent jamais être une certitude, contrairement à ce que la rigueur des mathématiques laisse supposer. Les seules certitudes sont les règles logiques de manipulation des symboles, qui permettent de conduire des raisonnements justes. Ensuite il y a la corrélation entre ce que prévoient ces règles et la mesure ou l'expérimentation, pour voir si le modèle « colle » bien à ce qu'il représente, mais cela se fait avec une précision obligatoirement limitée et donc avec une marge d'incertitude qui ne peut être nulle.
Par phénomènes perçus : on ne peut modéliser que ce qui se prête à la mesure et à l'observation. Nos sens nous renvoient une certaine image de ce qu'ils peuvent percevoir du monde. Le monde ne se limite pas à ce que l'on peut en voir, et selon la nature des sens de l'observateur peut apparaître avec des caractéristiques différentes.
Si vous êtes daltonien il y a de fortes chances que vous ne voyez pas le chiffre caché dans l'image ci-dessous, car vous discernez difficilement les verts et les rouges.
Pourtant ce nombre est là.
Soyez sûr maintenant, car nous sommes d'évidence des êtres finis, que les sens humains ne couvrent pas tout ce qu'il est possible de voir : cet exemple simpliste vous donne une petite idée de la différence entre la réalité du monde et celle des phénomènes perçus.
Mais en plus de la limitation des sens humains, il faut ajouter la limitation de notre entendement.
Par exemple la notion d’espace* (euclidien, vectoriel,etc..) est un modèle, une structure abstraite, issue de l’imagination des scientifiques. Ce n’est pas une propriété de notre monde :
c’est un concept inventé par l’homme pour nommer la profondeur, selon les 3 axes, qu’il perçoit par ses sens et son entendement.
Les théories modernes ont d’ailleurs besoin d’ajouter d’autres dimensions aux 3 principales pour tenter d’intégrer d’autres propriétés observées à l'échelle microscopique. Ce qui confirme l’idée que plus on avance dans l’investigation scientifique, plus les modèles géométriques évoluent pour essayer d’englober de plus en plus de nouvelles propriétés observées.
Souvent l’amalgame est fait entre le modèle* mathématique et les propriétés de notre monde, même par les plus grands scientifiques, qui, le nez plongé dans leurs équations, en oublient qu'elles ne sont que constructions de l'esprit.
Si je dis « notre espace-temps », il y a un abus de langage : ce n’est qu’un modèle géométrique plaqué sur la partie émergée de l’iceberg de notre monde que l’on appelle l’univers observable.
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Platon
Donc ce que j’appelle le Grand Monde va au-delà de cet univers scientifique et nous sera toujours inconnaissable pour pas mal de de raisons que nous verrons, dont certaines apparaissent comme des limites infranchissables à notre connaissance, et qui ont déjà été avancées par des scientifiques théoriciens (voir la bibliographie) ou par de grands philosophes.
Une fois que cette différence entre le monde réel et celui des phénomènes observés est bien marquée, comme dans l’analogie de la caverne dans la République de Platon, tout devient possible pour tenter enfin d’imaginer autre chose que cette plate réalité décrite par la science d’aujourd’hui.

Allégorie de la caverne

Elle a été exposée par Platon dans le Livre VII de la République.
Des hommes sont enchaînés dans une caverne, dos à l'entrée. Ils ne peuvent voir que les ombres projetées sur le mur du fond qui leur fait face. Un feu, à l'extérieur, éclaire toute ce qui passe devant l'entrée et projette ainsi des ombres sur le mur du fond..
Ces hommes enchaînés, qui n'ont jamais vu le jour, symbolisent la condition humaine, qui n'a qu'une perception amoindrie du monde réel, le confondant avec le jeu d'ombres projetées.
Si l'un d'eux venait à s'échapper et parvenait à contempler le vrai monde extérieur, en dehors des apparences, à son retour, comment arriver à faire partager ce qu'il aurait vu ? Comment être cru par les autres ?

Un hasard douteux

Un exemple de question à se poser :
le Hasard*, ce Dieu imprévisible de la science existe effectivement dans l’univers observable, mais existe-t-il dans le monde réel ?
Karl Popper a montré que l’univers physique était indéterministe par le simple fait que la vitesse de la lumière y était une limite à la portée des effets d’une cause, engendrant la notion de sphère de causalité* qui restreint la propagation des forces et de l’information. Cette sphère crée des zones d’ombre sources d’une incontournable indétermination. J’y reviendrais plus tard.
La physique quantique est fondée sur des lois probabilistes et statistiques, et son efficacité se démontre tous les jours.
La biologie, l’évolution des espèces, font intervenir le hasard comme composant indispensable aux mutations génétiques, à l’adaptation à l’environnement, etc..
Bref, toutes les théories modernes intègrent d’une façon ou d’une autre le hasard comme élément intrinsèquement lié au fonctionnement de notre univers. Il serait à l’origine de tout, de l’univers, de la vie, de la conscience...
Mais quelle est la nature du hasard ? Une force ? Une loi ? Un élément agitateur ?
C’est quelque chose que l’on ne peut mettre en équations mathématiques déterministes. C’est quelque chose qui est au-delà de ce que notre arsenal mathématique et physique peut appréhender correctement. C’est ce qui ne suit pas une relation de cause à effet physique.
C’est cela qui le rend si intéressant !
Mais si l’on n’oublie pas notre point de départ, nous pouvons en déduire que le hasard est un élément descriptif des modèles mathématiques imaginés pour approcher notre univers observable. Mais l’on ne peut franchir le Rubicond en supposant qu’il est une propriété de notre monde réel !
Toute la démarche exposée ici consiste justement à prendre comme hypothèse qu’il n’en fait pas partie. Et chemin faisant à montrer que cela n'a aucun sens de dire que quelque chose est arrivé par hasard. En d’autres termes partons de l’hypothèse que notre monde réel est déterministe, mais que la faible partie observable que la science tente de décrire, elle, ne l’est pas. Pour tenter une formulation différente :
l’univers observable est indéterministe, le monde réel ne l’est pas.
Dans cette hypothèse donc le hasard n’existe pas ! Mais il peut apparaître malgré tout sous le microscope des scientifiques. C’est parce que la science ne peut tout englober, ne peut tout mettre sous forme d’équations qu’elle voit du hasard.
C’est parce que la réalité sous-jacente aux phénomènes physiques n’est pas atteignable que l’on voit du hasard.
Le hasard n’est qu’un avatar dont l’existence trouve son origine dans la distance entre la réalité du monde et cette réalité dégradée qu’est le modèle scientifique utilisé à sa place.
Du coup, un nouveau domaine d’investigations méta-physique (au sens littéral) s’ouvre.
Et je vous invite ici à faire travailler votre imagination pour penser ce méta-monde, celui en dehors de l’univers observable, cette réalité d'un autre niveau dont tous les phénomènes que nous observons sont issus.

Nature du lien esprit-corps

Pour pouvoir investir ce nouveau monde, nous imaginerons qu'il entretient le même rapport avec notre univers de matière que celui existant entre notre esprit et notre corps.
Pourquoi cela ? Qu’est-ce qui nous est si familier et qui n’entre pas dans le champ de la physique, qui ne peut se réduire à des propriétés de localisation, de force, d’attraction, etc...?
Notre esprit ! Il n’a pas d’étendue, ni de masse, etc.. La science ne peut le contenir dans son univers géométrique remplie de forces, de mouvements et d’énergie.
Notre esprit agit pourtant de façon indéniable sur notre corps, l'actionne, tout en ne répondant pas à des critères de relations causales « physiques ».
Notre esprit est en parfaite contradiction avec toutes les lois de la physique moderne, et malgré tout, reste la seule chose dont on ne peut douter quand on se met à « cogiter » comme Descartes.
On peut appeler notre esprit le méta-niveau de nos neurones, tout comme la réalité du monde est le méta-niveau de l'univers matériel, et ceci sans préjuger à l'avance du type de liaison que ce « méta » induit.
livre patrice2_html_3eab4358L'esprit est peut-être soit une substance différente de la matière soit une façon différente d'en parler, soit une propriété émergente de la structure complexe de la matière. Mais peut-être n'est-il rien du tout ou, a contrario, la seule réalité du monde, peu importe pour l'instant, il sera pour nous un méta-niveau de la matière, dusse-t-il n'être que purement formel.

Ariane et son fil
La liaison entre notre esprit et notre corps sera notre fil d’Ariane pour nous amener de l’autre côté du décor et tenter de définir ce qui s’y cache !
Et nous tenterons plutôt que d'éliminer l'un au profit de l'autre, d'en faire la synthèse, faire de ces deux substances duales un nouveau matériau composite et le seul nécessaire pour comprendre le monde. Et cette recherche nous amènera également à imaginer le rapport primordial existant entre le dieu des religions, défini comme le créateur de l'univers , et le hasard ontologique de la science « responsable » du Big-Bang.
C’est dans la recherche de cette voie médiane, de ce nouveau paradigme, que je vous invite ici.



Patrice Weisz